Pas question que Monaco soit inscrite en 2024 sur la liste grise du GAFI. La sortie du suivi renforcé de Moneyval est la priorité du nouveau Conseiller-Ministre des Finances, Marco Piccinini.
A Monaco, Marco Piccinini était “sorti de l’ombre” en 2011 en entrant au Gouvernement monégasque, après avoir occupé des postes clés chez Ferrari mais aussi à la Fédération Internationale d’Automobile (il en a été vice-président entre 1998 et 2008). L’homme d’affaires, Conseiller Spécial auprès du Ministre d’Etat (2017), revient aujourd’hui en pleine lumière pour succéder à Jean Castellini au poste de Conseiller de Gouvernement-Ministre de l’Economie et des Finances. L’idée étant de capitaliser, dans un contexte compliqué de suivi renforcé de la Principauté par Moneyval, sur son expérience de la négociation en terrain miné. La feuille de route fixée par le Palais Princier est claire : « Personnalité monégasque respectée dans le domaine de l’économie et des finances, M. Piccinini dirigera les efforts visant à renforcer la position économique de Monaco sur la scène mondiale et à promouvoir un environnement favorable à la prospérité et l’innovation ». Ce qui implique que le dossier Moneyval est bien « la priorité des priorités », comme le nouveau ministre l’a fait comprendre dès sa première apparition publique. « On doit agir comme un commando pacifique. Il faut sortir de cette période de suivi renforcé. Nous serons jugés sur les normes adoptées et l’efficacité de leur application. De nouveaux fonctionnaires, en renfort, suivront de près cela », a précisé le nouveau Conseiller-Ministre. Pas question que Monaco figure sur la liste grise du GAFI. « Au mois de mars, on rendra notre copie au Groupe d’Action Financière (GAFI), le frère ainé de Moneyval », annonce Marco Piccinini, qui insiste sur la mobilisation gouvernementale et sur le fait que les efforts seront renforcés d’ici là.
Deux nouvelles lois à venir
Deux lois renforçant l’arsenal anti-blanchiment ont déjà été adoptées en 2023. Elles ont transformé le Service d’Information et de Contrôle sur les Circuits Financiers (SICCFIN), créé en 1993, en une Autorité Monégasque de Sécurité Financière, indépendante et avec des pouvoirs élargis. Mais aussi fixé une obligation nouvelle pour les associations et fondations de déclarer leurs bénéficiaires effectifs, ou encore adapté le régime de contrôle (et de sanctions) des bénéficiaires effectifs en cours de vie des entités déclarantes. « Les parties III et IV des textes législatifs seront bientôt votées », note Marco Piccinini. Le troisième volet de cette réforme législative, étudié actuellement par le Conseil National, vise à répondre aux exigences de Moneyval de renforcer l’efficacité de la procédure pénale (par des contrôles préventifs requis par le Procureur Général en dehors de toute enquête), tout comme du dispositif pénal relatif aux saisies, de réduire les délais de procédure ou encore d’améliorer les techniques spéciales d’enquête (par les opérations sous couverture). Le texte prévoit également d’aggraver les sanctions des infractions en matière de blanchiment de capitaux et de contournement par des mesures de gel d’avoirs.
La menace de la liste grise du GAFI est dans tous les esprits. A la rentrée judiciaire, le nouveau Procureur Général de Monaco Stéphane Thibault y a fait largement allusion. « La sécurité financière et bancaire qui prévaut en Principauté pourrait être fragilisée si Monaco était inscrit sur la liste desÉtats qui présentent des déficiences stratégiques dans le régime de lutte contre le blanchiment de capitaux (…). La lutte contre le blanchiment, déjà très prégnante, constituera le premier objectif du parquet général pour l’année judiciaire 2023-2024. »
Miléna Radoman