La vente aux enchères immobilières ouvre la porte à des occasions uniques. Comme le montre cette annonce pour un penthouse en plein Carré d’or bien en dessous de sa valeur…
Un sublime penthouse quadruplex de 1648m2 (dont 875m² habitables) du 26, Carré d’Or mis à prix à 49 millions d’euros… L’annonce de cette vente aux enchères immobilière, programmée le 16 mai 2025, devrait intéresser de nombreux acheteurs (fortunés) désireux de faire une belle opération. Surtout sur un marché où selon l’Observatoire de l’immobilier 2024, les ventes d’appartements des 5 pièces et plus dépassent les 2,5 milliards d’euros… Dans la corbeille, il y a en jeu un appartement « avec une vue mer panoramique à 360° sur toute la Principauté qui se décline sur quatre étages et dont chacun est relié par un ascenseur panoramique et un escalier majestueux privés » – selon le promoteur Segond – mais aussi 4 parkings et une piscine à débordement…
C’est tout l’intérêt de cette alternative à l’achat traditionnel. Les ventes immobilières, signalées par des affichettes jaunes en ville – et au Journal de Monaco –, sont souvent l’opportunité de faire un très bon coup car le bien est généralement déprécié. « J’ai pu participer à une vente aux enchères d’un bien évalué à 150 millions d’euros qui est parti à 75… » explique l’avocat Régis Bergonzi, familier de ce type de dossiers. En 2021, la villa Unda Maris, sur le Rocher, a elle été vendue aux enchères pour 75 millions d’euros alors qu’un expert évaluait le mètre carré à 75.000 euros. Le prix du bien aurait donc pu s’envoler à 165 millions d’euros…
Jurisprudence hésitante
Pourquoi une telle baisse ? « La mise à prix peut être extrêmement basse si la banque couvre juste sa créance… Or, si en France, une loi permet expressément au juge de rehausser le prix de la mise à prix pour éviter que le propriétaire saisi ne soit floué lors de la vente aux enchères, à Monaco, la situation est différente. La jurisprudence est hésitante. Le tribunal a pu juger qu’il avait la possibilité de rehausser le prix. Mais il a également pu juger l’inverse. Le tout, au cours des trois dernières années… » constate l’avocat selon qui le scénario de ces ventes aux enchères est classique. « Dans la quasi-totalité des cas, ces ventes ont lieu suite à une saisie immobilière, lorsqu’une banque a octroyé un crédit et que celui-ci n’est pas remboursé ». Et ce, parce que l’acheteur d’un bien immobilier rencontre des difficultés passagères ou bien qu’il a eu les yeux trop gros au regard de ses capacités financières. « Il existe également le cas de personnes inscrites sur des listes de blocage de fonds. Le placement sous sanction financière ciblée (SFC) entraine des blocages à tous les niveaux. Même le paiement des échéances d’un prêt peut être extrêmement compliqué parce que l’argent ne peut plus être transféré au plan international… Parfois même, indépendamment de toute inscription sur une liste, il peut y avoir des grippages dans le système bancaire pour toutes les personnes originaires d’Europe de l’Est, en particulier de Russie. Des difficultés de transfert des fonds vont provoquer des incidents de remboursement et augmentent le risque que la garantie immobilière soit actionnée » liste l’ancien bâtonnier, qui conseillede surtout ne jamais s’en remettre à une éventuelle mansuétude ou patience de la banque. « Seules comptent les conditions contractuelles qui ont été souscrites. Tout le reste, c’est de la philosophie… » La déchéance du terme met alors fin au contrat de prêt et permet au prêteur d’exiger le remboursement immédiat du solde. Les délais pour rembourser la somme sont limités et la banque peut être expéditive, surtout si elle a envie de se débarrasser d’une relation qu’elle estime comme toxique.
Ventes à la bougie
Pour participer à ce type de ventes, sachez qu’il faut montrer patte blanche. « Une personne qui souhaite enchérir doit consigner une certaine somme d’argent », indique Régis Bergonzi, rappelant que le délai entre l’affichage et la vente aux enchères est court. « Souvent, dans le cahier des charges, est de plus exigé que le paiement se fasse par une banque monégasque et par un chèque de banque. Ce qui complique encore les choses et limite le nombre d’acheteurs potentiels. Sur des biens d’exception, le nombre d’enchérisseurs tient sur les doigts d’une main ! » Le décorum reste très vieille école. Comme en France, ces ventes se font à la bougie, vieille tradition découlant du code civil napoléonien. La durée de l’enchère est limitée à la consumation de trois bougies qui, lorsqu’elles s’éteignent, laissent monter une fumée indiquant leur extinction. Mais attention : « Une vente aux enchères peut être annulée à la dernière seconde ! Le temps de la saisie est souvent utilisé par le propriétaire pour mettre un terme à la procédure et trouver un accord avec la banque. »