La Nouvelle Règlementation établit un distinguo net entre le régime applicable aux actes de démarchage effectués sur le Territoire de la Principauté et ceux réalisés à distance. Olivier Marquet – Managing Partner et Marine Tarditi – Senior Associate du cabinet d’avocats CMS Monaco décryptent pour Monaco Economie les implications de ce changement.
La nouvelle loi n° 1.529 du 29 juillet 2022, issue du projet de loi n°1.049, portant diverses dispositions d’ordre économique et juridique (la « Nouvelle Règlementation ») vient offrir de nouvelles opportunités aux sociétés étrangères non règlementées à Monaco en modifiant la loi sur les activités financières n°1.338. Elle met fin à des difficultés d’interprétation de la loi n° 1.515 du 23 décembre 2021 (l’ « Ancienne Loi ») qui verrouillait trop radicalement l’accès, pour les sociétés étrangères non agréées, à la clientèle de la Principauté.
DEMARCHAGE SUR LE TERRITOIRE DE LA PRINCIPAUTE, UN PRINCIPE D’INTERDICTION SOUFFRANT D’EXCEPTIONS
Si le principe d’interdiction initial demeure, celui-ci se voit désormais adjoindre des exceptions vis-à-vis de cibles sophistiquées.
Aux termes du paragraphe 1er de l’article 29 de la loi n°1.338 (telle que modifiée par la Nouvelle Règlementation), les démarches, sollicitées ou non sollicitées, en vue de proposer des services, des instruments ou des produits financiers à des personnes domiciliées en Principauté, qui seraient effectuées par toute entité non agréée au titre de la loi n°1.338, sont interdites sur le territoire de la Principauté.
Cette interdiction sous la Nouvelle Règlementation est étendue à « toute personne ou à toute entité non agréée », fermant ainsi la porte à toute construction juridique ou à toute personne physique non agréée en Principauté.
Des exceptions au principe d’interdiction sont toutefois apportées dès le second paragraphe de l’article vis-à-vis d’investisseurs institutionnels ; de sociétés agréées ; ou de clients d’une société agréée lorsque les démarches sont réalisées par son intermédiaire.
Cette évolution législative apparaît légitime vis-à-vis de cibles sophistiquées et semble reprendre l’idée d’une catégorisation des clients (telle que la Directive MIF le fait en Europe mais sans aller jusqu’à en adopter la classification).
En parallèle, la Nouvelle Règlementation apporte un assouplissement pour les actes de démarchage effectués vis-à vis de professionnels du secteur bancaire en autorisant les évènements organisés sur le territoire de la Principauté les réunissant, sous réserve d’en informer préalablement la Commission de Contrôle des Activités Financières et sauf avis défavorable de sa part. La permission de tels événements pour les acteurs non agréés va plus loin que ce que prévoyait le rapport du projet de loi 1.049. La question de l’organisation de ce type d’événements ne s’était en effet pas posée pour les acteurs non agréés. La Nouvelle Règlementation a finalement tranché différemment.
DEMARCHAGE A DISTANCE, UN REVIREMENT DE POSITION CONSACRE LEGALEMENT
La Nouvelle Règlementation vient valider, sous son nouvel article 29-1, tout acte de démarchage qui serait réalisé à distance lorsque l’acte est sollicité, et lorsque la cible est déjà cliente.
L’article 29-1 interdit toute démarche non sollicitée réalisée à distance, en vue de proposer des services, des instruments ou des produits financiers, à des personnes domiciliées en Principauté. Une lecture a contrario de ces dispositions permet d’en déduire que, dès lors que l’acte de démarchage a été sollicité par un prospect, une entité/personne étrangère non agréée pourra lui proposer ses services, instruments ou produits financiers, sous réserve que la proposition soit réalisée à distance. Le Législateur adopte ici un revirement de position qui suggère une règlementation beaucoup plus souple, en ligne avec la plupart de celle de nos pays voisins. L’ordonnance souveraine qui viendra compléter la Nouvelle Règlementation devra venir préciser les contours de la « reverse solicitation ».
Par exception, l’interdiction posée par l’article 29-1 ne s’applique pas lorsque la personne domiciliée à Monaco est d’ores et déjà cliente de la personne ou de l’entité non agréée.
Dans l’esprit des négociations actuelles relatives à un accord d’association entre Monaco et l’Union Européenne, le Législateur fait un pas en avant en adoptant des concepts déjà entérinés chez nos voisins européens et en ouvrant le marché financier monégasque, tout en protégeant ses ressortissants les moins avertis.