Le secteur du bâtiment et de la construction est un important contributeur d’émissions de gaz à effet de serre, avec 38% des émissions de CO2 mondiales. C’est pourquoi les professionnels du BTP tentent de réduire leur impact carbone. Comment ? Focus sur une opération pilote : MoNa residence, alimentée en chaud et en froid par sa propre boucle géothermique…
A Monaco comme dans d’autres pays, le BTP représente un tiers des émissions de Gaz à effet de serre (en 2019 dix milliards de tonnes de CO2). C’est pourquoi l’ONU appelle à « réduire agressivement la demande énergétique dans l’environnement bâti, décarboner le secteur de l’électricité et mettre en oeuvre des stratégies de matériaux qui réduisent les émissions de carbone sur le cycle de vie »… En première ligne pour atteindre l’objectif de neutralité carbone en 2050, le BTP cherche alors aujourd’hui à favoriser la durabilité et l’efficacité énergétique du bâti. « C’est une préoccupation majeure au sein du Groupe Michel Pastor depuis 2006. Nous avons structuré notre approche avec une certification Iso 14001, une démarche assez peu fréquente chez les promoteurs immobiliers. Nous avons identifié l’impact carbone de nos activités (ressources, process, flux, etc.) ainsi que les mesures pour réduire nos émissions de GES », explique ainsi Serge Ginesy, responsable environnement chez MPG, la branche ingénierie du groupe.
Les impacts sur la planète sont aujourd’hui estimés sur l’ensemble du cycle de vie d’un bâtiment, de l’extraction de matières premières au transport et distribution de ces matériaux avant le chantier, jusqu’à la fin de vie du bâtiment avec un recyclage des matériaux, en passant, bien évidemment par la phase de chantier et de construction, avec ledéfi de gestion des déchets, mais aussi par l’exploitation du bâtiment… « Nous essayons d’avoir une approche globale et pragmatique. Nous opérons une veille technologique, et choisissons des matériaux adaptés (comme du béton bas carbone) pour la construction et souhaitons trouver des solutions technologiques que peuvent s’approprier facilement les utilisateurs du bâtiment, qu’il s’agisse des résidents ou des équipes techniques, afin d’optimiser sa performance énergétique. Une interface domotique, placée dans chaque appartement, permet ainsi d’effectuer un pilotage des installations de chauffage, de climatisation et d’éclairage et encourage les comportements vertueux. »
Une opération certifiée BREEAM
Le dernier immeuble du groupe, la MoNa residence, conçue par Jean-Michel Wilmotte et le cabinet Rainier Boisson à Monaco. « Sa réalisation s’est inscrite dans la démarche volontaire de certification BREEAM, niveau excellent. Il s’agit du premier projet de construction de logements collectifs en Europe continentale à avoir souscrit à ce programme », explique Aïleen Fabre, directrice commerciale du Centre Immobilier Pastor. Une certification qui garantit que le bâtiment limite la production de gaz à effet de serre grâce à l’utilisation d’énergies renouvelables et offre des performances élevées en matière d’isolation thermique. « Il existe des contrôles qualité à chaque étape du chantier », note le responsable environnement de MPG.
Une boucle géothermique creusée avec 40 forages de 250 m
Dans l’arsenal déployé pour cette tour de 86 mètres, une boucle géothermique assure ainsi 100% du chauffage et du refroidissement du bâtiment à travers l’exploitation de dalles actives. « C’est la seule boucle de cette dimension à Monaco, qui permet d’être autonome. Sur le plan technique, il a fallu effectuer 40 forages de 250 m et placer 10 000 m
de sondes dans les puits de forage ! C’est une opération très technique, réalisée par des spécialistes. Cela nécessite beaucoup de surveillance, car il faut notamment gérer la traversée de nappe d’eau souterraines sans provoquer de pollution » observe Serge Ginesy. L’avantage des dalles actives est de « bénéficier de l’inertie du bâtiment et de bénéficier d’un régime de température d’émission peu élevé allant de 18° en rafraichissement à 28° en chauffage. » D’autres solutions ont été intégrées afin de limiter les chaleurs estivales : brise-soleil coulissants sur les loggias et brise-soleils orientables intégrés dans les menuiseries des baies vitrées, doubles vitrages à lame d’argon ou encore châssis à rupture de pont thermique… « Les balcons de chaque étage eux-mêmes servent de protection pour l’étage d’en-dessous. Cela réduit l’inconfort d’été avec un Pourcentage Prévisible d’Insatisfait inférieur à 10% (pourcentage de personnes jugeant l’ambiance thermique inconfortable) sans ajout de climatisation ! » estime Serge Ginesy.
« Monaco nous pousse à être innovants »
La verticalité architecturale et l’utilisation du verre dans une tour apparaissent à première vue tout sauf écologiques. Quelle est la réalité ? « Rien n’est tout blanc ou tout noir, juge Serge Ginesy chez MPG. A Monaco, la surface est limitée et les possibilités d’extension en mer ne sont pas infinies. On a besoin de verticalité et cela nous pousse à être innovants ! On peut de plus mutualiser la performance énergétique dans une tour, grâce à un système performant, pour tous les résidents. En comparaison avec des logements individuels, il y a moins de déperditions dans un immeuble sur le plan énergétique (par rapport à un nombre identique d’habitants) ».
« On anticipe les réformes »
Sur le toit (soit 70 m2), des panneaux solaires thermiques ont été installés, produisant 46% des besoins en eau chaude sanitaire ; et d’autres solutions permettent d’améliorer la performance énergétique : des systèmes de détection de présence pour commander l’éclairage dans les parties communes, des sources basse consommation (LED) pour les éclairages collectifs, un arrosage automatique des espaces verts commandés par une station météo, un tri sélectif des déchets à l’étage… « On va au-delà des réglementations française et monégasque. On anticipe les changements et les réformes, en s’inspirant des pays les plus avancés », souligne Serge Ginesy, pour qui « il est impératif d’avoir toujours une longueur d’avance… »