L’économie américaine a jusqu’à présent réussi à déjouer la récession et devrait se stabiliser vers la fin 2025, après un modeste repli. L’inflation, elle, devrait atteindre son plus bas en début d’année, avant de rebondir au-dessus de 2,5%, ceci quel que soit l’impact des politiques budgétaires attendues de Donald Trump.
Autrement dit, les prévisions de baisse des taux d’intérêt directeurs aux Etats-Unis, à 3% d’ici à la fin 2025, semblent trop optimistes. En effet, la Réserve fédérale américaine aura à composer non seulement avec une forte hausse des salaires, mais également avec la perspective du budget expansionniste de la nouvelle administration au pouvoir.
Nul doute que le retour de Donald Trump aura pour effet de redessiner le contexte économique et géopolitique de ces dernières années. Selon les prévisions, il est probable que le Président réélu cherche à obtenir un cessez-le-feu en Ukraine et exerce une pression budgétaire sur l’Europe avec l’instauration de droits de douane, mettant ainsi à l’épreuve des économies déjà engluées dans des dettes colossales.
Donald Trump pourrait alors de nouveau avoir à faire avec la Chine, son adversaire notoire durant son premier mandat, ce qui impacterait les relations des Etats-Unis avec le Mexique – un élément clé dans la volonté de Washington de réduire la dépendance du secteur manufacturier vis-à-vis de Pékin. L’objectif des Etats-Unis est notamment d’éviter le plus possible que la Chine se serve du Mexique pour contourner les taxes douanières américaines. De plus, la période précédant la renégociation, en 2026, de l’accord de libre-échange ‘Canada-Etats-Unis-Mexique’ pourrait être particulièrement complexe pour toutes les parties jusqu’à ce qu’un accord soit finalement conclu. Dans un tel contexte, les nombreuses entreprises qui relocalisent leurs activités opérationnelles en réponse aux guerres commerciales choisiront probablement l’Inde comme nouvelle destination. En effet, d’un point de vue géopolitique, ce pays devrait nettement bénéficier des futures décisions attendues de la part des Etats-Unis.
En Europe, le gouvernement de coalition allemand s’est fracturé puis effondré peu de temps après les élections américaines. Ceci est intervenu à la suite d’un débat autour de la politique budgétaire allemande au vu de la perspective d’une attitude plus belliqueuse des Etats-Unis, et aussi de la réaction de la Chine. De plus, ce différend budgétaire en Allemagne fait en réalité écho au thème du financement de la compétitivité future de l’ensemble de l’UE, comme décrit dans le rapport publié à la mi-2024 par M. Draghi, Président de la Banque centrale européenne.
Pour les investisseurs, l’impact majeur de la politique budgétaire expansionniste menée par les principaux blocs économiques – Etats-Unis, Royaume-Uni, Japon – devrait se faire sentir sur les rendements obligataires, alors que la tendance haussière sur le marché des obligations mondiales, observée depuis 1981, touche à sa fin. En conséquence, les hedge funds, et en particulier les stratégies centrées sur l’arbitrage et la valeur relative, peuvent susciter un réel attrait dans le contexte de forte volatilité sur les taux d’intérêt attendu en 2025.
Tout comme l’Inde devrait constituer un marché ‘refuge’ face à de nouvelles politiques sur les droits de douane venant redéfinir la structure du commerce global, Singapour et la région ASEAN semblent également bien positionnés, à l’heure où la politique budgétaire mondiale tend à s’étendre pour soutenir la croissance globale. Offrant une porte d’accès vers les économies à forte croissance structurelle de l’Asie du Sud-Est (région ASEAN) et vers l’Inde, les actions sur le marché de Singapour devraient potentiellement afficher un profil risque/rendement attrayant. Elles devraient en outre permettre une exposition à la croissance soutenue des Etats-Unis ainsi qu’aux tendances de croissance supérieures observées en Asie du Sud et en Asie du Sud-Est, mais aussi à la perspective de mesures de relance de la part de la Chine.
Dans le même temps, les changements séculaires au sein de l’économie mondiale se poursuivent à un rythme soutenu. L’intelligence artificielle (IA) demeure au premier plan de ces transformations. Cependant, le déploiement de l’IA devrait franchir une nouvelle étape. Il a en effet débuté par le développement du matériel – lequel a profité aux fournisseurs de puces et d’« informatique en nuage» («cloud computing») ces dernières années –, mais désormais, ce sont les logiciels et les «cas d’usage» («use cases») qui devraient lui emboîter le pas, et dominer la prochaine phase de croissance de l’IA.
En conclusion, 2025 s’annonce comme une nouvelle année de profonde mutation pour l’économie globale – sur le plan de l’inflation, de la géopolitique et de la technologie. Les investisseurs devront donc apprendre à naviguer dans un contexte de fragmentation croissante, tout en se concentrant sur les pôles de résilience qui existent à travers le monde.