Selon le dernier rapport annuel Artprice, 2024 s’impose comme l’année la plus dynamique de l’histoire du Marché de l’Art mondial, avec 1,2 million d’œuvres mises aux enchères et 804 350 transactions ! De quoi « contrebalancer une érosion du chiffre d’affaires global » de -33,5 %, impacté principalement par la pénurie d’enchères millionnaires… Qu’en est-il de Monaco ?
Pas facile de se faire une place au soleil sur la carte du marché de l’art. La concurrence est féroce. Selon le rapport annuel Artprice 2024, le peloton de tête est bien installé, même si les puissances émergentes progressent vitesse grand V.
Monaco dans le top 100 ?
« Les États-Unis préservent leur première place avec 39 % du Marché de l’Art mondial. L’Union Européenne (hors UK) est désormais numéro 1 mondial en nombre de transactions et numéro 2 en termes de chiffres d’affaires avec 18,5 %, ce qui correspond à son rang de 3ème puissance économique mondiale avec un PIB de 16.970 milliards en 2023. La Chine, avec 18,4 % de parts de marché mondial, est pratiquement à jeu égal avec l’Union Européenne (hors UK) », observe l’étude de référence dans le milieu, selon qui les trois premières puissances font du Marché de l’Art un véritable soft power. « Le Royaume-Uni maintient sa troisième place par pays avec 15 % du marché mondial. La France demeure à la quatrième place, avec 7 % du chiffre d’affaires mondial mais signe cette année trois records: elle est n°2 mondial en termes de transactions juste derrière les USA ; Paris est la 4ème place de marché mondiale, dépassant Pékin & Shanghai ; La France est première en Europe en termes de chiffre d’affaires», analyse encore Artprice, qui classe Monaco parmi les 100 premières villes mondiales pour la vente d’œuvres d’art aux enchères.
Tradition princière
A Monaco, l’intérêt pour l’Art est une tradition. Depuis le XIXe siècle, la famille princière monégasque a joué un rôle crucial dans la promotion des arts, avec la création de musées et l’implantation d’événements artistiques d’envergure telles les fameuses Biennales des antiquaires et de sculptures. « Monaco a toujours été un endroit où les antiquaires et les galeries ont eu pignon sur rue, un petit peu comme Beaulieu-sur-Mer où, à une certaine époque, il y avait une quarantaine d’antiquaires ! Ils ont été petit à petit remplacés par les salles de vente qui jouent un rôle prédominant dans le marché de l’art », indique Joël Girardi, Fondateur de la maison Accademia Fine Art. Au fil des années, les plus grandes maisons comme Sotheby’s, Artcurial et Christie’s ont en effet implanté une antenne en Principauté. Une installation qui coïncide avec l’interdiction des ventes aux enchères internationales à Paris. Pour contrer le monopole des commissaires-priseurs français, Sotheby’s puis Christie’s, organisent des ventes très haut de gamme à Monaco, dans le faste du Sporting d’Hiver. Ambiance champagne et smoking avant le coup de marteau… Et pour cause : Monaco attire une clientèle composée d’ultra-riches, qui considèrent l’art comme un investissement sûr et un symbole de prestige. Sur 2 km2, le micro-Etat abrite un nombre record au m2 de collectionneurs, d’investisseurs ou de marchands d’art comme David Nahmad. Tandis que la présence d’une population internationale, constituée d’hommes d’affaires, de sportifs et de célébrités, contribue à faire de la Principauté un terrain fertile pour les ventes aux enchères. Surtout l’été ou lors du Grand Prix de Monaco, où les passionnés d’art et de luxe se croisent. Les ventes les plus prisées concernent les tableaux de maîtres, les bijoux et les objets de collection. Monaco est également une plateforme idéale pour les ventes caritatives et les enchères à thème. Les grandes maisons de vente organisent d’ailleurs également des ventes privées et sur invitation, offrant à une élite triée sur le volet l’accès à des pièces rares. Cette stratégie, combinée à des événements exclusifs, permet d’attirer des acheteurs potentiels de toute la planète…
L’un des principaux attraits de Monaco pour les acheteurs et les vendeurs d’art réside dans sa fiscalité avantageuse. Contrairement à d’autres places de marché comme Londres ou New York, la Principauté ne prélève pas d’impôt sur la plus-value lors de la revente d’une œuvre d’art. Un résident monégasque, ou un Monégasque ne sera donc pas soumis à l’impôt sur la plus-value réalisée lors d’une vente aux enchères (1). Alors qu’à titre d’exemple en France, les taxes sur la plus-value s’appliquent pour tout bien vendu d’une valeur supérieure à 5 000 euros HT, prix marteau. De plus, l’absence de droits de succession pour les résidents monégasques en fait un lieu stratégique pour la transmission de collections. « Selon les règles de droit interne monégasque, des droits de donation et de succession s’appliquent à Monaco aux biens situés sur le territoire de la Principauté ou qui y ont leur assiette et ce quels que soient le domicile, la résidence ou la nationalité du défunt ou du donateur et des héritiers ou donataires. A Monaco, les métaux précieux, les objets d’art, de collection et d’antiquité sont traités comme les autres biens mobiliers pour les besoins des tarifs des droits de mutation. Ainsi, le niveau d’imposition est en fonction du degré de parenté entre le défunt/donateur et son héritier/bénéficiaire/donataire. A ce titre, aucune imposition n’est due en ligne directe (entre parents et enfants ou grands-parents et petits-enfants) et entre époux », comme le rappelle Audrey Michelot, du cabinet CMS.
L’impact du digital sur le marché monégasque
Autre phénomène : avec l’essor des enchères en ligne et des nouvelles technologies, le marché de l’art à Monaco se digitalise. Les maisons de vente utilisent désormais des plateformes permettant aux acheteurs de placer leurs enchères à distance, élargissant ainsi leur audience et augmentant les records de ventes. Les NFT et la blockchain font également leur apparition sur le marché monégasque, notamment avec des galeries et ventes d’art numérique qui attirent un nouveau public d’investisseurs technophiles. Monaco n’a pas d’autre choix que de surfer sur les nouvelles tendances. Comme le fait remarquer Artprice, « la dématérialisation intégrale du Marché de l’Art sur Internet domine désormais sur l’ensemble des 5 continents, reléguant les salles de ventes physiques à l’histoire du XXème siècle. Thierry Ehrmann, Président d’Artmarket.com et Fondateur d’Artprice estime que la liquidité du Marché de l’Art global, qui ne cesse de croître sans interruption depuis 2000 «est rendue possible grâce à la progression spectaculaire sur Internet des Maisons de Ventes aux enchères avec, d’une part, un accroissement de +720% de l’annonce des ventes aux enchères sur Internet, et d’autre part, les ventes en live qui ont progressé de +210 % dans le monde, après les années de pandémie COVID. De tels chiffres étaient normalement attendus pour 2027. »
- « Les résidents de bonne foi de Monaco qui vendaient à Monaco ne payaient pas la TF tant qu’ils avaient la preuve que ce qu’ils vendaient se trouvait à Monaco. Et la preuve de l’entrée sur le territoire et de la propriété, bien entendu ! Attention car une carte de résident monégasque n’exempte pas le client de la taxe forfaitaire. Le client peut vivre à Monaco mais être résident fiscal français » souligne Louise Grether, Directrice de Sotheby’s Monaco. « Il existe trois possibilités pour un résident monégasque d’être exempté de la taxe forfaitaire : soit il est résident fiscal dans un pays autre que la France : il doit produire une attestation sur l’honneur (attestation de non-résident) et une pièce d’identité ; soit il est résident fiscal à Monaco : il doit en apporter la preuve (document de l’administration monégasque relatif à l’impôt sur le revenu) ; soit il est « résident monégasque privilégié » : Il est résident fiscal français, habite à Monaco et peut prouver qu’il y habite depuis au moins 5 ans avant le 13 octobre 1962. Il doit en apporter la preuve. »