Mais pourquoi vit-on dans un « monde qui ne nous appartient plus », dans lequel on est plus « chez soi » ? Un monde sans équilibre entre HARMONIE, PROPORTION et FONCTIONNALITÉ du LIEU ?
Longue est la liste de choses qui participent à l’écume du temps.
Fin XIXe les architectes _ LECORBUSIER _ GROPIUS _ VAN de ROHE _ WHRIGT voulaient créer une nouvelle vision de la Maison mais aujourd’hui plus personne n’utilise même le mot MAISON ; sont utilisés des mots abstraits tels « édifice ou design » où partout il s’agit du même style, où rien ne différencie un lieu d’un autre, où celui qui construit va jusqu’à la préoccupation d’annihiler toute différence, tout doit être identique !
GROPIUS écrivait dès 1934 :
« une fracture avec le Passé s’est ouverte et nous permet d’individualiser un aspect nouveau de l’Architecture qui correspond à la civilisation manifestement technique dans laquelle nous vivons. » « La morphologie des styles MORTS est irrémédiablement dépassée ».
En fait, l’ignorance du Passé, même comme patrimoine à observer et à préserver, est un obstacle à la création d’un tissu urbain continu qui relierait les lieux dans une même harmonie ; l’impact de l’Architecture Nouvelle crée une faille définitive.
Le « gigantesque » a profondément impacté les lieux ; chaque architecte est confronté à l’obligation de réaliser un bâtiment plus grand, plus haut, plus surprenant que celui de son confrère ; « on dit que c’est l’érotisme de l’Architecture au service du Pouvoir » ; c’est un futur devenu présent qui nous entraîne avec lui ; il transporte ARGENT et POUVOIR à l’image du luxe fondé sur le VIDE.
Le changement est plus net encore….
Les modules utilisés étant répétitifs et les matériaux d’origine mondiale, quel que soit l’endroit où nous nous trouvons, nous avons systématiquement l’impression d’être toujours au même endroit ; actuellement toute construction dite contemporaine n’en est qu’une version « pauvre » ; dans cette lande désolée de constructions anonymes et dévastatrices, surgit « le GIGANTESQUE ».
Aujourd’hui, nous assistons à la version « pauvre de l’Architecture contemporaine ».
Les architectes, pour se démarquer ainsi, ont été amenés à construire des objets démesurés face à la technologie : l’invention de l’ascenseur qui date de la fin du XIXe siècle a considérablement modifié les valeurs de l’habitat. Une valeur sûre, vivre au contact de la « terre » (rez ou 1er étage au maximum) est devenu un lien sombre et opprimant.
Le désir de grandeur était assujetti à une grande préoccupation de l’URBANISME et soumis aux lois classique de l’Architecture. La disparition de ces éléments dès la seconde moitié du XXe siècle a provoqué l’application généralisée du « gigantesque » partout dans le monde!
À travers ces constructions, c’est à dire « qui ne crée aucun endroit de rencontre » celles-ci poussent au beau milieu d’un pays, pleines de présomption : Musées (de rien), gares, auditoriums, stades, bureaux mais pratiquement JAMAIS de maisons.
L’habitation véritable enjeu de l’Architecture n’est pas prise en considération, si ce n’est comme une « affaire privée » de moindre intérêt. Les formes prises par ces bâtiments sont le reflet de l’argent avec lequel ils ont été construit et non d’une fonctionnalité bien pensée.
Ils ne prennent pas soin de l’Homme. Ils n’ont pas de MÉMOIRE, ne vieillissent pas et n’engagent aucun dialogue avec le TEMPS , sont le reflet d’un monde qui a cessé de vouloir exister sur terre.
Ce que nous avons en mains désormais ce sont des choses vides et indifférentes : « On a perdu la mesure des choses »
Extraits de Les Lieux et La Poussière de R. Peregalli.
Suzanne Belaieff