Atteindre l’objectif ‘net zero’ nécessite des investissements importants et une volonté politique concertée. BloombergNEF (BNEF) estime cet investissement à USD 92’000 milliards-USD 173’000 milliards sur les trois prochaines décennies.
Jusqu’à présent, la transition énergétique s’inscrivait dans le cadre d’un programme d’action environnementale à long terme. Or, la récente crise de l’énergie a démontré notre dépendance vis-à-vis des combustibles fossiles ainsi que les graves difficultés économiques et perturbations provoquées par de soudains chocs de l’offre (p. ex. sur le gaz russe). La nécessité de s’orienter vers les énergies renouvelables – impliquant des systèmes énergétiques locaux et donc facilitant l’indépendance dans ce domaine – est donc devenue un impératif économique de court terme alors qu’elle constituait jusque-là un objectif de long terme. Ceci est particulièrement déterminant pour les régions manquant de ressources de combustibles fossiles domestiques comme l’UE, le Japon, la Corée du Sud et, dans une certaine mesure, la Chine.
Le coût des combustibles fossiles a aussi été l’argument économique justifiant une réorientation vers des renouvelables plus attractifs. Selon BNEF, les nouvelles énergies éoliennes et solaires terrestres sont aujourd’hui d’environ 40% moins onéreuses que celles à base de charbon et de gaz. Les renouvelables se caractérisent également par des coûts variables négligeables, un atout clé dans un contexte inflationniste. Les nouvelles énergies éoliennes terrestres coûtent environ USD 46/MWh et l’énergie solaire à grande échelle USD 45/MWh, contre USD 74/MWh pour les nouvelles énergies à base de charbon et USD 81/MWh pour celles à base de gaz.
De plus, les économies développées doivent revoir leurs systèmes énergétiques, les infrastructures arrivant en fin de vie. Les réseaux américains, par exemple, ont souvent entre 40 et 50 ans, alors que la France essaie de trouver des moyens pour étendre l’usage de ses centrales nucléaires et que l’Allemagne compte assurer sa sécurité énergétique en réactivant d’anciennes centrales à charbon, peu per-formantes. Les politiques mises en place tendent donc désormais à soutenir l’investissement dédié aux infrastructures énergétiques. La récente Loi américaine sur la réduction de l’inflation a ainsi alloué USD 369 milliards pour la lutte contre le changement climatique et le lancement de programmes énergétiques.
Implications pour les marchés actions
La récente crise énergétique confirme l’importance de l’énergie pour les économies mondiales. Sans énergie, pas de croissance. Nous voyons aujourd’hui à quel point la croissance est affectée par les pénuries d’énergie (notamment en Europe), avec pour effet une hausse des coûts. Les transitions énergétiques sont disruptives et ont donc des impacts majeurs sur les économies et les investissements. Par ailleurs, elles ne sont pas linéaires. Dans ce contexte, certaines valeurs sont bien positionnées et d’autres sont à la peine. Les entreprises fournissant des solutions proactives face aux défis actuels (p. ex. les opérateurs
de renouvelables ou la ‘clean tech’) présentent un potentiel de création de valeur prometteur car elles peuvent profiter de solides vecteurs de croissance à l’avenir, tandis que celles forcées d’accepter les prix de l’énergie, sans plan d’urgence, devraient être mises à mal.
La disponibilité des capitaux sera aussi conditionnée par les pro-grammes de décarbonation. Les obligations vertes deviennent une source de financement majeure, bénéficiant d’une forte demande. Comme souligné précédemment, les gouvernements proposent de plus en plus des incitations à investir. A l’inverse, les industries polluantes ont toujours plus de difficultés à lever des capitaux, tant sur les marchés actions que sur ceux de la dette, et cela profitera aux entreprises propres. Les pollueurs seront également confrontés à une hausse des coûts à l’heure où les politiques gouvernementales entendent de plus en plus les pénaliser, avec notamment des impôts sur les bénéfices exceptionnels pour les industries polluantes réalisant des profits exceptionnels (comme le secteur pétrolier et gazier), ou un renforcement des réglementations environnementales. Autant de mesures pesant sur la valeur des sociétés qui ne sont toujours pas engagées dans la transition.
La nécessité d’agir se fait heureusement toujours plus pressante vu le coût croissant de l’inaction. Les dépenses s’accélèrent, avec à la clé une forte création de valeur pour les sociétés qui apportent des solutions visant à lutter contre le changement climatique et à atténuer ses effets.