Les cycles de hausse de taux aux Etats-Unis (US) et en Europe devraient toucher à leur fin en 2024, laissant ainsi du répit aux investisseurs pour l’année à venir. Si les pressions inflationnistes ont diminué depuis la mi/fin 2022 du côté américain et européen, les marchés obligataires mondiaux apparaissent de nouveau ‘récompenser’ les investisseurs pour leur prise de risque. Il paraît envisageable donc de réintroduire une exposition aux taux d’intérêt de long terme. Ainsi, dans un contexte où les rendements se modèrent, il est possible de réaliser de modestes gains en capital, et ce pour la première fois depuis 2020.
Les investisseurs qui ont pu ‘s’abriter’ sur le segment du crédit en 2023 devraient se montrer plus méfiants en 2024, et notamment chercher à être davantage ‘rémunérés’ pour le risque de crédit encouru. Les cycles de refinancement devraient repartir de plus belle, et conduire ainsi à la prochaine vague de défauts de crédit à l’heure où les sociétés digéreront un nouveau régime de hausse des taux d’intérêt. D’ici là, les obligations «investment-grade» peuvent constituer un réel refuge. Pour les investisseurs en quête de rendements supérieurs, nos prévisions de forte volatilité sur les marchés actions nous amènent également à penser que les stratégies de portage sur la volatilité peuvent s’inscrire en complément d’une exposition aux obligations «high yield» de duration courte, avec à la clé un potentiel de revenus plus élevés en 2024.
Bien que les valorisations supérieures à la moyenne suscitent quelques préoccupations pour le début de l’année prochaine, elles devraient toutefois tendre à baisser au moment où les bénéfices des entreprises retrouvent des couleurs, en particulier parmi les poids lourds américains de la technologie.
LA FORCE DE LA TECHNOLOGIE ET DE L’INDUSTRIE
Alors que les pressions s’atténuent sur les taux d’intérêt, l’accélération des dépenses en intelligence artificielle devrait se combiner avec la reprise conjoncturelle à l’œuvre dans le domaine du cloud, du e-commerce et de la publicité digitale pour générer des niveaux de revenus et de croissance des bénéfices à deux chiffres à mesure que le calendrier avance – bénéficiant au secteur de la ‘Big Tech’ et à celui des logiciels.
En dehors de la technologie, les investisseurs peuvent aussi s’orienter vers des sociétés de qualité, mais à la traîne, qui permettent d’accéder à de solides bilans et à une croissance bénéficiaire fiable.
Par ailleurs, le cycle industriel apparaît rebondir , sous l’impulsion de la nouvelle politique américaine en matière d’activité manufacturière. Les US s’attachent en effet à contribuer au monde de demain, en construisant les infrastructures, les secteurs, et la production énergétique du 21e siècle.
Même si, sur les marchés actions, les investisseurs n’ont guère été ‘récompensés’ dans le domaine de la transition énergétique, les dépenses des US en faveur de la construction industrielle se montaient à USD 1’900 milliards à fin août 2023. Ceci représente une progression de près de 65% en glissement annuel, soit
la plus importante hausse jamais enregistrée en un siècle, venant ainsi donner un nouveau souffle à la croissance économique et à l’emploi. A cet égard, le financement alloué par le gouvernement fédéral à cette nouvelle politique industrielle devrait s’accélérer encore plus fortement sur la période 2024-2026, avec pour conséquence une amélioration des bénéfices du côté des entreprises. Par ailleurs, une stabilisation des rendements sur le marché obligataire devrait se traduire, pour les projets à plus long terme, par une plus grande visibilité en termes de financement courant 2024 et au-delà.
DE MEILLEURES PERSPECTIVES POUR LES BÉNÉFICES DES SOCIÉTÉS
NON AMÉRICAINES
S’agissant des marchés hors Etats-Unis, les actions non américaines se traitent en dessous de 13 fois les bénéfices, soit juste au-dessus des niveaux observés durant la pandémie de 2020-2021, un plancher de valorisation historique. Ainsi, les perspectives sur les bénéfices de ces titres peuvent constituer le point de mire des investisseurs en termes de génération de performance. A cet égard, le Japon se distingue tout particulièrement, ayant procédé à une réforme complète des entreprises et de l’économie du pays en 2012. Depuis lors, les sociétés japonaises ont affiché 11% de croissance des bénéfices (taux de croissance annuel composé), surpassant l’indice S&P 500 et égalant l’indice Nasdaq 100.
Après le puissant rebond des actions japonaises opéré fin octobre 2023 (+22,3%), la tendance de marché haussière du Japon devrait se poursuivre en 2024. Les prévisions font état d’une croissance bénéficiaire qui se hisserait à 7% sous l’effet de la reprise industrielle mondiale au premier trimestre 2024, avec des performances totales qui devraient continuer à être soutenues par des rachats d’actions, et des dividendes en hausse.
AU-DELÀ DE LA VOLATILITÉ, CONSIDÉRER LE POTENTIEL DE PERFORMANCE À VENIR
Si les risques sont élevés durant cette phase de transition au sein de l’organisation économique mondiale, des opportunités se dessinent au gré de l’émergence de nouveaux équilibres, à l’instar de ceux observés sur les marchés des obligations gouvernementales globales.
Il serait judicieux pour les investisseurs de tenter de faire abstraction de la volatilité à court terme et se concentrer sur le potentiel de performance lié à la transformation de l’économie globale à long terme – notamment dans les secteurs de la technologie et des nouvelles énergies, sans oublier la mutation de l’ordre mondial désormais en cours.
Norman Villamin, Chef stratégiste Groupe, Union Bancaire privée (UBP)