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LEFGITY : « Les cryptoactifs font partie du paysage de l’épargne et de la gestion de la fortune »

Qui investit dans les cryptos? Quelles cryptomonnaies privilégier? Quel impact aura la faillite de FTX ? Fondateur et PDG de la fintech Ledgity, Pierre-Yves Dittlot livre son analyse et balaie les idées reçues.

Vous travailliez dans le secteur de la finance traditionnelle. A quel moment avez-vous décidé de vous lancer dans les cryptomonnaies?
Après de nombreuses recherches, dès 2017, j’ai pu identifier que la technologie Blockchain allait révolutionner l’industrie financière et que les cryptos avaient le potentiel de devenir une classe d’actifs d’investissement à part entière, au même titre que les actions et les obligations. On en était alors aux prémices des cryptomonnaies… Force est de constater que 5 ans plus tard, cette tendance s’est confirmée. Les cryptoactifs font réellement partie du paysage de l’épargne et de la gestion de fortune. Leur proportion reste certes faible car ce sont des actifs risqués dont la valeur peut fluctuer à la hausse ou à la baisse de façon importante. Mais pour la majorité des investisseurs, la partie du capital allouée aux cryptos va de 1 à 10%.

Quel est le concept de Ledgity?
Il existe aujourd’hui chez les épargnants un besoin d’accéder facilement aux cryptos. Aujourd’hui, votre banque ne vous permet pas d’accéder à cette nouvelle classe d’actif et d’investir facilement sur le Bitcoin. Cela peut en partie s’expliquer par le fait qu’il est impossible de conserver vos cryptoactifs sur un compte titre. Les cryptos ont leurs propres caractéristiques et notamment en ce qui concerne leur conservation qui se fait via un wallet crypto permettant de sécuriser vos cryptos et de pouvoir initier des transferts vers un autre wallet sur la blockchain. C’est pourquoi nous avons créé le concept d’application crypto patrimoniale pour réconcilier cette classe d’actifs avec la gestion de patrimoine et de fortune. L’objectif est de démocratiser et simplifier l’accès à l’investissement en cryptomonnaies tout en en permettant aux utilisateurs de consolider toute leur épargne sur une interface unique. Si par exemple, vous avez un compte en banque chez Société Générale, une assurance Generali, un compte titre chez BNP Paribas et un wallet crypto, vous pouvez visualiser, grâce à l’application Ledgity, l’ensemble de votre patrimoine en un clic. Cela permet aussi de mieux identifier le risque crypto et de piloter ses opérations de manière plus fine.

Quelle est votre cible? Des épargnants privés et des investisseurs professionnels?
Notre positionnement est BtoBtoC. L’interface Ledgity Pro vise les professionnels de la finance, du gestionnaire de fortune au Family Office. Elle aide les indépendants du conseil en investissement à facilement accompagner leurs clients sur les investissements cryptos avec un suivi patrimonial global. Nous avons rajouté une messagerie sécurisée et d’autres fonctionnalités qui facilitent et renforcent la relation conseiller financier et clients. Avant son lancement sur le marché mi-décembre, la solution a été béta testée par plusieurs gestionnaires de fortune, et a évolué grâce à leurs retours. Elle pourrait intéresser également des petites banques privées, en marque blanche, pour opérer leur transformation digitale.

Vous avez fait toute votre carrière à Monaco. Pourquoi avoir lancé Ledgity en France?
La BPI est un important accélérateur de l’innovation en France et nous a soutenu dès notre lancement. La France a de plus été précurseur en Europe et dans le monde en termes de régulation des cryptos. Nous avons été enregistrés cet été prestataire de services sur actifs numériques par l’AMF et l’ACPR. Ce cadre réglementaire nous permet d’offrir les services de conservation de crypto et d’échanger des euros contre des cryptos et cryptos contre cryptos. Nous avons l’objectif de nous développer en France, à Monaco, en Belgique, au Luxembourg et en Suisse, qui sont des places de banque privée, de gestion de fortune et de patrimoine.

Quel est le profil type des investisseurs en cryptos?
En majorité, ce sont des profils plutôt jeunes, entre 18 et 35 ans car ils sont nés dans le digital, avec un smartphone à la main… Pour autant, nous avons des retours de conseillers financiers qui ont des clients de 75 ans investissant dans le bitcoin!

Quel est le développement potentiel de ce marché selon vous?
Selon une étude de McKinsey, la gestion de fortune représente en Europe 25 trillions d’euros. Si seulement 1% de cette somme était allouée aux crypto actifs, cela représenterait 250 milliards d’euros! De même, d’après la Banque de France, les Français ont épargné 160 milliards (livret A, assurance vie, etc.) en 2021. Toujours d’après la Banque de France, l’épargne cumulée en France représente 5 trillions d’euros. Imaginez ce que représenterait le marché des cryptos avec juste 1% de cette somme dévolue aux cryptos en France!

Quelles cryptomonnaies conseillez-vous?
Dans un premier temps, il vaut mieux rester sur le Bitcoin et l’Ethereum qui représentent à elles seules 38% et 17% du marché des cryptos actifs!

Malgré l’impact écologique du Bitcoin, qui consommerait 138 téra watts/heure soit 0,62% de la consommation mondiale d’électricité?
C’est un faux débat. L’industrie bancaire consomme beaucoup plus d’électricité au niveau global. Et que dire des services digitaux que tout le monde utilise quotidiennement comme, le Cloud, Netflix ou Spotify? Dans ce cas-là, il faudrait tout arrêter et revenir 20 ans en arrière au plan économique! Par ailleurs, une grande partie de l’énergie consommée pour le bitcoin est verte.
Pour les cryptos, la consommation d’énergie provient de la façon dont fonctionne la blockchain, appelé le protocole de consensus qui permet de maintenir à jour la blockchain et de valider les nouvelles opérations. Le protocole Bitcoin est basé sur la preuve de travail (Proof of Work). Cela se matérialise par le travail de milliers d’ordinateurs. Dans un système fonctionnant avec un protocol proof of work, les « mineurs » doivent solutionner une équation complexe, qui demande beaucoup de puissance de calcul. Récemment, Ethereum a changé son protocole pour passer en Proof of Stake, lui permettant de consommer 99% d’énergie en moins! Cette méthode a l’avantage de ne pas nécessiter la puissance de calcul d’ordinateurs afin de faire marcher et sécuriser la blockchain.

Les cryptomonnaies sont également critiquées en raison du manque de régulation. La réglementation MICA va permettre de changer la donne?
Aujourd’hui en Europe, à part le statut PSAN en France (et à Monaco), il n’y a peu de régulation… C’est normal, les cryptos sont une classe d’actifs jeune et une régulation nécessite du temps pour être mise en place. L’Europe va s’inspirer de la réglementation française, qui déploie un enregistrement et un agrément PSAN, avec des exigences sur l’expertise des dirigeants – comme pour les sociétés de gestions – et les procédures de lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme – équivalentes au système bancaire. Avec MICA, qui a pour vocation d’harmoniser, au niveau européen, la règlementation des acteurs proposant des services sur actifs cryptos (au plus tard en 2024), nous devrions tendre vers une procédure d’agrément qui imposera de nouvelles contraintes tels qu’un montant capital de la société plus élevé et une assurance responsabilité civile professionnelle plus importante. Une fois que MICA sera mis en place, les acteurs européens auront 18 mois pour se mettre en conformité. C’est positif pour les investisseurs et les clients.

Surtout lorsque l’on voit la récente faillite de FTX…
La faillite de FTX, et avant elle, de la plateforme Celsius, est un grand classique! Rappelons qu’il s’agit d’acteurs domiciliés dans des paradis fiscaux comme les Bahamas et les Seychelles, qui ont commis des fraudes et ont utilisé les fonds des clients à des fins spéculatives et personnelles. C’est une affaire Madoff en version crypto avec le déploiement des mêmes ressorts et stratégies! A la tête de FTX, Sam Bankman-Fried, 30 ans, avait un masque de philanthrope: c’était le deuxième plus important donateur des démocrates américains. FTX était très proche des régulateurs américains comme la SEC.
Avec une réglementation plus claire, on ne sera pas à l’abri total des fraudes mais cela va créer un écosystème de confiance plus important et assainir le marché avec des acteurs plus fiables.

Comment voyez-vous l’évolution?
Au plus haut du marché, les cryptos représentaient 3 trillions de dollars de valorisation. Aujourd’hui on est autour de 800 milliards. Il y a une concentration des acteurs. Binance représentait autour de 50% – 60% de parts de marché avant la chute de FTX, et va probablement progresser pour être proche de 70% des parts de marché. FTX était la deuxième plus grosse plateforme en 2021 avec 700 milliards de volume à l’année après Binance (2,5 trillions de dollars).

Comment faites-vous pour contrôler l’origine des fonds?
Il y a 3 niveaux de KYC. Nous contrôlons d’abord l’identité de la personne (on vérifie si elle n’est pas sous sanction internationale), puis, en fonction de la somme déposée, nous demandons des compléments d’information telle que la preuve de résidence (au-dessus de 5 000 euros) et la provenance des fonds (au-dessus de 50 000 euros). C’est très facile de tracer l’origine des fonds sur une blockchain, de remonter à l’origine du bitcoin ou de la crypto reçus. Dans l’exemple où le client comporte une fortune en crypto, il nous est facile de comprendre la provenance de fonds grâce à des questions additionnelles et l’analyse des transactions « on-chain » de l’adresse blockchain du wallet du client. La blockchain est un registre public. Il suffit d’appliquer un filtre, scanner l’adresse de provenance des fonds. Il existe des listes d’adresses blacklistées liées à une activité criminelle. Si le risque est trop élevé, nous sommes tenus d’effectuer une déclaration de soupçon au Tracfin en France ou au Sicfin à Monaco.

Les malfaiteurs utilisent régulièrement des cryptomonnaies telles que le bitcoin ou l’ethereum?
C’est une idée reçue. D’après Chainalysis, sur le volume de transactions en cryptos de 2021, la proportion liée à une activité frauduleuse est de 0,15%! Pour blanchir l’argent, rien ne vaut le dollar, utilisé dans la majorité des cas, or ce n’est pas une raison pour le supprimer!

On parle des monnaies virtuelles comme outil idéal des transactions sur le dark web, notamment dans le cadre de trafic de stupéfiants?
Le protocole mixeur Tornado a été utilisé pour anonymiser des transactions et brouiller les pistes. Pour les autorités américaines, toutes les opérations qui sont passées par ce protocole sont blacklistées et peuvent faire l’objet de sanction de la part de l’OFAC du département du trésor américain (Office of Foreign Assets Control). Pour rappel, l’OFAC a pour but d’appliquer des sanctions économiques et commerciales fondées sur la politique étrangère et les objectifs de sécurité nationale des États-Unis à l’encontre de pays et de régimes étrangers ciblés, de terroristes, de trafiquants de stupéfiants internationaux, de personnes engagées dans des activités liées à la prolifération d’armes de destruction massive et d’autres menaces pour la sécurité nationale, la politique étrangère ou l’économie des États-Unis.

Propos recueillis par Milena RADOMAN

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